L’article de cette séance est un article de Clarida, Gali et Gertler (1999) central en macroéconomie monétaire.
Les auteurs évaluent les évolutions dans la conduite de la politique monétaire aux Etats-Unis à la suite de l’arrivée de Volcker à la tête de la FED, en 1979, et l’impact que cela a eu sur la stabilité macroéconomique du pays.
Premièrement, ils estiment économétriquement les paramètres d’une règle de politique monétaire dans la période pré et post-Volcker. Cela leur permet de mettre en évidence le poids plus important donné aux variations de l’inflation anticipée dans la fonction de réaction de la FED dans la seconde période.
Les auteurs présentent un point de vue très (excessivement ?) positif sur la conduite de la politique monétaire aux Etats-Unis dans les années Volcker puis Greenspan. En effet, dans un deuxième temps, ils introduisent les paramètres estimés dans un modèle théorique qui leur permet de montrer l’impact stabilisant qu’a eu cette évolution dans la politique monétaire, limitant notamment les mécanismes auto-réalisateurs (hausse de l’inflation anticipée -> déclin dans le taux d’intérêt réel si la banque centrale n’augmente pas suffisamment le taux d’intérêt nominal -> hausse de la demande agrégée -> hausse effective de l’inflation).
L’article s’inscrit dans le cadre théorique nouveau keynésien, qui domine aujourd’hui la macroéconomie monétaire, et qui repose sur un certain nombre d’hypothèses fondamentales (concurrence monopolistique qui permet de micro-fonder les rigidités nominales notamment, prédominance du taux d’intérêt comme instrument de politique monétaire etc…), qui aboutissent à un modèle canonique micro-fondé qui se caractérise sous forme réduite par :
1) une courbe de Phillips micro-fondée : une équation caractérisant la dynamique des prix en fonction de l’output gap
2) une courbe “IS” qui définit l’output gap comme une fonction du taux d’intérêt réel et des anticipations de croissance
puis une règle de politique monétaire :
3) une fonction de réaction du taux d’intérêt cible à l’inflation anticipée et à l’output gap
4) une équation caractérisant la dynamique du taux d’intérêt en fonction du taux cible et de ses valeurs passées
Dans un autre papier, les mêmes auteurs décrivent les évolutions de la recherche sur la conduite de la politique monétaire dans les années 1980 et 1990, dans un contexte scientifique où la mise en avant de l’existence de rigidités de court terme et l’amélioration du cadre théorique sous-jacent ont permis de mettre en évidence le rôle de la politique monétaire à court terme.
La présentation du papier peut être élargie aux éléments de discussion suivants : quel a été l’impact de l’imposition du cadre nouveau keynésien comme le paradigme dominant en macroéconomie monétaire ? Quels en sont les développements récents et les limites ? Quelle est l’actualité du débat sur les règles de politique monétaire ?
Deux points se dégagent plus particulièrement à la suite de la crise financière de 2007-2008 puis de la récession mondiale qui a suivi.
Premièrement, reste t-il une marge de manoeuvre pour la politique monétaire dans une situation qu’on appelle “the zero lower bound”, c’est-à-dire quand le taux d’intérêt directeur s’approche de sa valeur plancher de zéro (ce qui peut être illustré par la mise en oeuvre de politiques monétaires non conventionnelles) ?
Deuxièmement, la politique monétaire doit-elle se contenter d’un objectif de stabilité des prix (et dans une moindre mesure de réduction de l’output gap) ou doit-elle aussi viser un objectif de stabilité financière (politique macroprudentielle et surveillance de l’évolution du prix des actifs notamment) ? Deux approches concurrentes coexistent sur cette question : l’approche “cleaning afterwards” : l’idée que la politique monétaire doit se contenter de viser à réduire l’impact de l’éclatement d’une bulle sur le prix des actifs financiers une fois qu’il s’est produit, et l’approche “leaning against the wind” : l’idée que la politique monétaire doit intégrer un objectif de stabilité financière ex-ante, en visant à empêcher la formation de bulles.
Pour compléter :
des notes de cours sur l’article de Clarida, Gali et Gertler (1999) proposant une synthèse des développements des années 1980 et 1990 de la recherche en matière de politique monétaire
Pour actualiser la question, un texte de Clarida (2010) qui décrit les développements des années 2000
Une présentation pédagogique du “nouveau consensus macro-monétaire”
Un article qui met en perspective les louanges puis les critiques qui ont été faites à la conduite de la politique monétaire sous la présidence d’A. Greenspan
Un article sur le débat “cleaning afterwards”/”leaning against the wind”
Des éléments de synthèse sur la question de la conduite de la politique monétaire “at the zero lower bound”